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6 questions à Anthony Peregrine, journaliste au Daily Telegraph

Ecrit le 05/15/2025

Le Figaro, le Daily Telegraph, the Times, Version Fémina, Goed Gevoel… Alors que la saison des accueils de presse bat son plein, on a posé quelques questions à Anthony Peregrine, le correspondant fidèle du Daily Telegraph, pour mieux comprendre ce que cherche la presse britannique.

Est-ce encore facile pour les Anglais de voyager en France ? La Grande-Bretagne vient de mettre en place des visas tourisme (ETA) pour les Européens qui veulent séjourner outre-Manche, qu’en est-il dans l’autre sens ?
A. Peregrine : Pour l’instant, aucune formalité particulière. Mais courant 2026, un système d’autorisation d’entrée du territoire (ETIAS) sera aussi mis en place depuis la Grande-Bretagne et vers l’espace Shengen, dont la France.

Anthony Peregrine journaliste au Daily telegraph

Trouvez-vous que les rubriques voyage des journaux britanniques ont changé ces dernières années ? Si oui, en quoi ? Quelles sont les nouvelles tendances ?
A. Peregrine : Oui, en effet. Tout d’abord on trouve beaucoup plus de reportages sur Les séjours bien-être (« wellness »), pour prendre soin de sa santé physique et mentale. Je pense qu’on peut y voir entre autres l’influence d’une nouvelle génération de rédacteurs-en-chef des pages voyages, en réalité très majoritairement des femmes, qui arrivent tout droit des magazines féminins et lifestyle et apportent avec elles leurs thématiques chouchou.
Heureusement, pour les journalistes comme moi qui aiment se plonger dans l’histoire des lieux visités et préfèrent des découvertes plus classi-

-ques, il y a toujours de la place pour des sujets plus traditionnels qui n’impliquent pas un passage obligatoire par un spa embué ou un restaurant végan – mais pas autant qu’avant.

Et sinon, on subit aussi toujours cette tendance très forte à faire des listes – « Le 10 meilleurs restaurants de Nimporteoù-sur-Mer », « Les 5 bonnes raisons de découvrir la Provence en hiver », …

Les lecteurs adorent qu’on leur facilite le travail de lecture et de décision.

Quel type de vacances cherche le lecteur classique du Daily Telegraph ?
A. Peregrine : Le lecteur classique du Daily Telegraph, qui n’est vraisemblablement pas dans sa toute première jeunesse, est plutôt aisé et cultivé. On trouve des ressemblances avec les lecteurs du Figaro (mais, quand même, avec un bien meilleur sens de l’humour !). Donc, si on généralise un peu, ce lecteur cherche plutôt des endroits historiques ou joliment ruraux, avec un fort élément culturel et aussi de la gastronomie et du vin. Évidemment, il y en a aussi qui cherchent des activités de plein air, comme la marche, mais globalement très peu qui rêvent de passer la journée dans un transat au bord de la piscine de leur gîte !

Site Daily Telegraph

Château de Loumarin et ses abords fleuris@AHocquel

Quelle image de la France ont les Britanniques ? Que viennent-ils chercher dans nos destinations ?
A. Peregrine : Il y a 2 niveaux de perception. La France de la politique, dont on parle aux informations, celle de Macron, insérée dans l’Europe post-Brexit et avec son lot de tensions diplomatiques. Mais ce n’est pas dans cette France-là que l’on passe ses vacances. La France des vacances, c’est celle des bons petits restaus, des châteaux, des vignobles et des marchés, des montagnes et des lacs, des rivières et des villages, des petits hôtels familiaux, des festivals… On vient précisément pour oublier le climat mondial tendu et profiter de la France éternelle, avec ses menus sur ardoise et ses apéritifs en terrasse qui s’éternisent.

Voyez-vous des dangers qui guettent nos destinations et qui feraient que d’autres régions ou pays pourraient gagner du terrain ?
A. Peregrine : Oui, je dirais la hausse des prix, surtout depuis la crise sanitaire. Et aussi la mort de certains centres-villes historiques au profit des zones commerciales, la disparition des petites boutiques multi-marques au profit de grandes enseignes mondiales. La Grande-Bretagne est déjà passée par là et cherche justement à s’en échapper ! En revanche, côté avantages, on peut citer bien sûr la proximité : la France est accessible en bateau ou en train, à l’heure où voyager en avion n’est plus si bien vu et où les voyages long-courriers sont moins relayés dans la presse. Et bien sûr, l’incroyable richesse culturelle, historique, gastronomique, la diversité des paysages et des activités possibles : aucun autre pays n’a une telle gamme d’éléments attractifs. Il faut juste veiller à préserver ces richesses.

Randonneurs seniors château de châteauneuf en fond@M Planque

Un conseil pour les relations presse avec la Grande Bretagne ?
A. Peregrine : Oui, cibler ses communiqués de presse. Je reçois quotidiennement des quantités pharaoniques de mails qui commencent « Bonjour Anthony » et puis me racontent des trucs qui n’ont aucun intérêt pour moi, car les émetteurs n’ont aucune idée de ce que j’écris ou de mes intérêts. Du coup ça provoque l’effet inverse, ça m’agace prodigieusement et en plus ça noie potentiellement d’autres communiqués de presse qui pourraient m’intéresser. Alors de grâce, réfléchissez à quelles informations vous envoyez à qui !

Et l’autre chose, c’est de ne pas oublier les grands marqueurs du territoire. Je sais que les organismes de tourisme sont friands de parcours « hors des sentiers battus », mais il ne faut pas oublier qu’il y aura toujours forcément des gens qui viennent pour la première fois dans vos régions et qui ont envie de voir ce dont ils ont entendu parler depuis des années. Ça ancre les territoires dans des marqueurs connus et ce sont des attraits forts.

Salon presse Londres 2025